La relation entre maître et disciple
Il semble tout d’abord important de réfléchir avec soin sur ce qui fait un bon maître, ensuite d’être sûr que le maître que nous choisissons est quelqu’un en qui nous pouvons faire confiance, quelqu’un que nous pouvons suivre même si la voie devient plus difficile que prévu. Suivre les instructions d’un maître ne signifie pas accepter aveuglément ce qu’on nous dit…. mais après avoir pris le temps nécessaire pour choisir avec soin un maître qui inspire la foi et la confiance, il importe de maintenir un esprit d’ouverture et de suivre sa direction.
Nous devrions prendre soin de ne pas être limités par nos préjugés au sujet de ce que doit être un maître. Nous sommes souvent influencés par des images extérieures – nous voulons que nos sens soient stimulés ou avoir de « bonnes vibrations ». Nous voulons également que la voie soit plaisante et aisément suivie. Mais un maître, comme un président, ne doit pas être choisi pour ses apparences.
Un maître en qui nous pouvons faire confiance pour nous guider doit avoir une réalisation expérimentale des enseignements alliée à de la compassion. Il importe également qu’il comprenne ses disciples et veuille réellement les enseigner, et qu’il soit libre des motivations émotionnelles ou égoïstes. Autrement dit, il doit savoir ce qu’il fait.
Un maître doit être lui-même équilibré afin de pouvoir assurer l’équilibre de ses disciples. Mais bien des traditions ont tendance à accentuer un aspect de l’instruction. Il arrive souvent qu’un maître n’offre pas un système complet d’enseignements – on peut donner de l’importance à la méditation sans l’accompagner d’une nécessaire formation philosophique, ou l’érudition peut n’être pas accompagnée d’une expérience pratique suffisante pour créer l’harmonie. Aussi il importe de considérer si oui ou non un maître accorde de l’importance à l’étude comme à la pratique. […]
D’une certaine manière, il importe peu à quoi ressemble le maître car c’est la relation qui compte. Cette relation est unique ; elle n’est pas comme une amitié sociale ordinaire qui dure rarement – elle ne s’arrête que lorsque nous avons atteint l’illumination. C’est le but et si nous voulons l’atteindre, nous devons travailler pour le protéger. […]
La relation entre le maître et le disciple peut être l’expérience la plus stimulante de notre vie, catalysant et enrichissant un processus de croissance plus que nous le pensions possible. Elle encourage également une attitude ouverte qui nous permet de recevoir tout ce que le maître a à offrir. On peut nous demander des tâches difficiles mais parfois des habitudes destructrices ne peuvent être brisées que par une grande persévérance de notre part. Le maître est là pour nous montrer nos possibilités. Quand finalement nous relions l’avis du maître à notre expérience, et que nous venons à réaliser la valeur de ses enseignements, nous pouvons nous voir plus clairement et ainsi être capables de travailler plus efficacement sur nos problèmes. En constatant nos changements, nous percevons le pouvoir du maître de transformer les facteurs négatifs en quelque chose de salutaire et de précieux. Aussi nous devons garder notre confiance dans le maître ; alors l’étude réelle – qui souvent se produit de façon déconcertante – peut avoir lieu. […]
[La relation] est basée sur l’honnêteté et la confiance. À ce moment, la compassion découle de notre ouverture et nous commençons à comprendre la responsabilité que nous avons envers nous-mêmes et les autres. […]
Si les liens de la connaissance expérimentale ne sont pas transmis à cette génération, de vastes espaces de sagesse seront perdus.
Tarthang Tulku, « La quête de l’harmonie : La relation entre maître et disciple», Trédaniel, 2003, p.194- 199.