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Apprendre par l’expérience

Apprendre par l’expérience
24 juin 2019 Sandy

Document commenté dans “Bouddhisme et Kum Nyé, Cours 5: Le karma

 

Apprendre par l’expérience

La méditation est un moyen d’ouvrir notre vie à la richesse de l’expérience, et non une pratique ésotérique limitée à certains lieux certains moments. Que nous vivions dans le calme de la campagne ou l’agitation de la ville, la méditation peut devenir une façon de vivre. Dans cette sorte de méditation, nous pouvons embrasser tout ce dont nous faisons l’expérience et en tirer des leçons.

Cependant, cette forme de méditation qui embrasse tout n’est pas aussi facile qu’elle semble, car elle implique une attention vigilante à toutes nos activités. Du simple acte de se lever le matin jusqu’à nos rêves la nuit, tout est inclus dans cette méditation. Nous apprenons à ouvrir nos sens à chaque nuance d’expérience, attentifs même aux plus infimes détails de notre vie – comme notre façon de marcher, de parler aux autres. Ainsi, nous apprenons à nous ouvrir à la vérité de notre expérience. Notre façon de vivre, ce qui se passe dans notre vie, la manière dont ce que nous vivons nous affecte : ceci est le fondement de la réalité, et la source de la conscience spirituelle.

Nous avons la possibilité de cultiver cette conscience dans tous les aspects de la vie – dans notre travail, nos relations, et même nos capacités. Ce sont tous des maîtres potentiels auxquels on peut s’ouvrir et dont on peut apprendre, lorsqu’on voit les occasions de croissance intérieure inhérentes à tout ce que l’on fait.

À mesure que nous apprenons par l’expérience vécue, notre appréciation de la vie augmente ; nos sens deviennent plus vifs ; notre esprit plus clair et d’une perception plus aiguë. Développer la conscience, la concentration, l’honnêteté, le soin et l’ouverture peut devenir une expérience illuminante ; et non seulement elle nous sera personnellement bénéfique, mais elle établira des qualités pouvant servir de lignes directrices à ceux qui nous entourent.

Avec le développement progressif de notre conscience, tout notre cadre de référence se transforme lentement. Nous voyons les interrelations de la pensée et de l’action, ce qui nous donne une plus grande sensibilité dans notre communication avec les autres. Nos observations pénètrent à des niveaux plus profonds – nous découvrons comment sont produits les sentiments, comment fonctionne la pensée. Quand notre conscience s’approfondit encore davantage, nous pouvons même percevoir le lien entre le passé, le présent, l’avenir, et apprendre donc à organiser nos actions afin que notre vie soit satisfaisante et accomplie.

Au début, cependant, notre vision est limitée : ce n’est pas facile de déterminer à l’avance les résultats de nos actes. Nous pouvons suivre les directives de la société, mais parmi elles, peu ont été créées dans la perspective d’un but et d’un résultat autres que limités. C’est pourquoi les résultats de nos actes paraissent quelquefois bons sur le moment, et se révèlent finalement nuisibles. Par frustration, nous essaierons peut-être d’imposer notre volonté au situations, rendant les choses encore pires.

L’attention vigilante, au contraire, ouvre notre vision à une action plus constructive. Et la patience donne à notre nouvelle perspective de l’espace pour œuvrer. La patience agit silencieusement, comme un agent secret, pour nous protéger du piège de l’action inutile et du désespoir. Lorsque nous la développons consciemment, elle peut devenir une réponse naturelle et appropriée à chaque situation nouvelle ; nous acquérons des forces qui nous permettront de venir à bout même des moments les plus difficiles.

Quand la patience est fortement développée, la conscience surgit même de l’intérieur de nos états négatifs, et de cette conscience vient notre méditation. Nous voyons que tout ce qui se passe est une manifestation de l’énergie, qui est une forme de notre conscience ; et nous réalisons que toute expérience, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, fait partie de la nature illuminée.

Cette conscience est accessible à tous ceux qui la cherchent ; on pourra toujours l’atteindre en examinant profondément la nature de l’expérience. Notre expérience peut nous mener bien plus loin que les façons ordinaires de penser, de voir et d’être. Elle peut nous mener jusqu’à l’Illumination même.

Quand nous atteignons un état de vraie conscience, nous sommes comme la fleur de lotus : le lotus est pur et beau, pourtant il croît dans la boue. Une fois que nous sommes conscients, nous pouvons fonctionner adéquatement même au milieu de la confusion du monde. Notre attitude positive est bénéfique pour nous et pour les autres ; nous vivons la vérité que nous avons acquise.

Le Samsara est semblable à un fruit empoisonné. Nous le mangeons, avec plaisir, mais à la fin il nous tuera, à moins que nous ne sachions transmuter le poison. Rien de ce qui appartient au plan samsarique ne peut nous donner ultimement la liberté et le contentement, ni réellement satisfaire nos désirs. Mais quand nous vivrons selon une perspective illuminée, le poison ne nuira pas, car le Nirvana est « dans » le Samsara. C’est la même chose. Ceci peut être difficile à comprendre si l’on ne sait pas d’abord comment transmuter les émotions et comment transcender les obstacles. Quand nous en serons capables, tout ce que nous ferons sera une aide. Mais avant, même si beaucoup de nos activités peuvent paraître satisfaisantes, nous ne faisons qu’accumuler plus de Karma  – plus de besoins et de mécanismes mentaux répétitifs qui sont une entrave.

Tarthang Tulku, Les clés de l’énergie et de l’épanouissement : « Apprendre par l’expérience », Dervy Poche, 2006, p. 19-22.